Coronavirus et annulation de commandes clients

Publié le mercredi 10 décembre 2025

Coronavirus et annulation de commandes clients

Une PME alimentaire fabriquant des produits MDD témoigne d’un problème d’annulation de commande de la part d’un distributeur. Réponse du cabinet FIDAL sur l’aspect juridique.

Question de la PME :

Notre entreprise fabrique notamment pour les réseaux de GMS et RHF des produits alimentaires à marque propre.

Dans le contexte de crise que nous connaissons, nous sommes confrontés à l’annulation de commande de certains de nos clients le jour de l’enlèvement de la marchandise au sein de notre usine. Ces décisions sont problématiques car nous ne pouvons pas redistribuer ces produits à marque propre à un autre client et qu’initialement il peut même nous être demande d’assurer une livraison optimale de ces mêmes clients.

Afin de gérer au mieux les relations à venir dans ce type de situation, pourriez-vous me préciser l’éventuel cadre juridique dans lequel nous pouvons travailler ?

Réponse juridique (FIDAL) :

Pour faire suite à votre email relatif aux annulations de commandes client, voici quelques éléments permettant de considérer que ces annulations sont abusives.

En principe, une commande acceptée vaut vente, avec obligation de livrer pour le vendeur et obligation de payer pour l’acheteur.

Il n’y a pas de droit de rétractation entre professionnels, de sorte que si le contrat ne prévoit aucune possibilité d’annuler une commande, dès lors que la commande est validée, le contrat est ferme.

Le défaut d’exécution est alors source de responsabilité : le vendeur risque de se voir appliquer des pénalités s’il ne livre pas, et l’acheteur qui paye en retard ou ne paye pas les produits livrés peut se voir également appliquer des pénalités de retard et une indemnité pour frais de recouvrement – a minima (c’est-à-dire que si un préjudice est subi, l’une ou l’autre des parties pourrait en théorie en obtenir l’indemnisation).

L’inexécution de ses obligations n’entraine néanmoins aucune responsabilité si elle est due à un cas de force majeure. Beaucoup tentent de s’en prévaloir compte tenu de la situation actuelle.

Néanmoins, pour votre parfaite information, en droit français, la force majeure est définie par l’article 1218 du code civil qui dispose que :

« Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1. »

La force majeure permet de justifier la suspension des obligations du contrat quand l’exécution est empêchée (comme la réception des produits) lorsque les trois critères suivants sont réunis :

  • Un événement indépendant de la volonté des contractants : le débiteur de l’obligation ne doit être pour rien dans la survenance de la situation qu’il invoque au titre de la force majeure  ;
  • Une imprévisibilité de événement au moment de la conclusion du contrat ;
  • Une irrésistibilité : les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées.

Certaines épidémies ont pu être considérées comme des cas de force majeure justifiant un retard dans l’exécution du contrat lorsqu’elles ont des conséquences particulièrement importantes (fermeture des frontières) et lorsqu’elles ne peuvent être combattues efficacement.

La jurisprudence a déjà eu à se prononcer plusieurs fois sur le point de savoir si une épidémie devait être assimilée à un cas de force majeure ou non au regard de ces éléments précités. Les appréciations des tribunaux ont été divergentes selon la gravité de la crise sanitaire, et sur le caractère irrésistible ou non . Il s’agit d’une interprétation au cas par cas.  

Au vu de ces éléments – et sauf dispositions contractuelles permettant à un acheteur d’annuler des commandes :

–          à défaut d’être en mesure de démontrer l’impossibilité d’exécuter ses obligations, la force majeure ne devrait pas pouvoir être utilement invoquée pour annuler des commandes qui ont été validées et qui peuvent être exécutées par le vendeur.

–          dans le cas où l’exécution est rendue impossible (notamment du fait des fermetures de certains commerces ordonnés par décret du 15 mars): les obligations sont tout d’abord suspendues, à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat.

La situation peut également évoluer à tout moment compte tenu des mesures gouvernementales qui pourraient être annoncées et l’impossibilité pour certains clients d’assurer la logistique (par exemple si personnel absent). Mais dans tous les cas, il appartient à celui qui se prévaut d’une impossibilité d’exécuter ses engagements d’en justifier.

Spécial PME FEEF : Retrouvez tous les documents utiles sur MA FEEF dans la base documentaire, filtre COVID-19