Plus que jamais la guerre des prix (Le Parisien du 15/02/21)

Publié le mercredi 10 décembre 2025

Plus que jamais la guerre des prix (Le Parisien du 15/02/21)


Alors que la grande distribution et les PME ont jusqu’au 1er mars pour s’entendre sur les prix, les effets de la loi Egalim se font attendre. Les producteurs, touchés par la crise sanitaire, se disent asphyxiés.

L’accalmie n’aura été que provisoire, et la guerre des prix est repartie, à tel point que le gouvernement vient de taper du poing sur la table. Alors que les négociations annuelles entre la grande distribution et les fournisseurs — dont beaucoup de PME — battent leur plein et doivent se conclure avant le 1 er mars, l’exécutif a constaté de fortes tensions entre les uns et les autres et la persistance de prix très bas qui étranglent les producteurs.

Cela va amener la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) à renforcer ses contrôles. Et une adresse mail tout juste mise en place (signalement@agriculture.gouv.fr) permet aux consommateurs de signaler des tarifs jugés trop bas dans les rayons par rapport aux coûts de production.

Dominique Amirault, le président de la Fédération des entreprises et entrepreneurs de France (FEEF), qui représente quelque 1 000 PME du secteur, nous confirme que l’ambiance est polaire. « Une fois de plus, les négociations commencent d’emblée sur une demande de baisse des prix, alors que les coûts ont progressé, sous la double impulsion du Covid (NDLR : qui oblige à multiplier les équipements de protection) et de la hausse du prix de certaines matières premières. »

Eleveurs, producteurs et PME sous pression
Sous couvert d’anonymat, le directeur d’une PME qui fabrique des produits de première nécessité embraye : « Jamais, en quarante ans, je n’ai connu une situation aussi tendue. Avec la hausse du blé dur, nos coûts ont bondi de 5 % et nous avons alerté les enseignes dès octobre. Et pourtant, elles nous demandent toutes de baisser nos tarifs de 1 à 3 % », s’étrangle ce chef d’entreprise qui, du coup, n’a signé pour l’heure aucun contrat. « La vérité, c’est que les grands distributeurs veulent garder les marges énormes gagnées en 2020 », assène celui qui craint de devoir se séparer de plusieurs salariés l’an prochain.

La loi Egalim, votée début 2019, dans la foulée des états généraux de l’alimentation, devait mettre bon ordre à tout cela et permettre de mieux rémunérer éleveurs, producteurs et PME du secteur. « Les distributeurs n’arrêtent pas de communiquer en disant qu’ils ont créé une filière du lait, du porc, etc., mais les progrès sont faibles et n’atteignent que 5 à 10 % des volumes, on est très loin du compte », estime Patrick Bénézit, le secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). « Les profits des distributeurs ont bondi mais les PME n’en voient pas la couleur », confirme Dominique Amirault, de la FEEF.

Et la loi ne s’est pas traduite non plus par une revalorisation durable des prix alimentaires… « Passé une hausse de 0,9 % en 2019, les prix sont repartis à la baisse depuis juin 2020 », souligne Emily Mayer, de l’Institut Iri. Bref, c’est le retour de la déflation. « En janvier, le tarif des produits alimentaires concernés par la loi Egalim a encore baissé de 0,41 % sur un an. »

Plus que jamais, les enseignes continuent à se battre à coups de tarifs bas et autres offres exceptionnelles. « Soyons clairs : c’est ce que veulent les consommateurs, défend un distributeur qui souhaite rester anonyme, par peur des représailles des agriculteurs. Quand le loyer ou le tarif de l’électricité augmente, les Français n’y peuvent rien, tandis que l’alimentation est pour eux une variable d’ajustement. Et encore plus depuis que la crise du Covid a fragilisé de nombreuses familles. »

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